La recherche de partenaires pour les artistes: le mécénat et le parrainage

On attaque donc le 4e épisode de notre dossier sur les aides et subventions aux artistes. Après les aides au clip, les aides au disque et les aides au spectacle vivant, on va parler aujourd’hui de la recherche de partenaires privés à travers le mécénat et le parrainage.

Merci encore une fois à l‘Irma et à ses fantastiques fiches pratiques.

Définitions du mécénat et du parrainage


Dans la recherche de partenaires privés pour le montage d’un projet culturel, deux termes juridiques sont reconnus :

  • le mécénat, « comme étant le soutien matériel apporté sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire, à une œuvre ou à une personne pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général» ;
  • le parrainage, « comme étant le soutien matériel apporté à une manifestation, à une personne, à un produit ou à une organisation en vue d’en tirer un bénéfice direct » (1).

Attention : Le soutien matériel implique tout apport financier et en nature (produit, services, main-d’œuvre). La structure qui apporte son soutien n’attend pas, en retour, de contrepartie équivalente. Le mécénat, même s’il autorise les contreparties, suppose une « disproportion marquée » entre les sommes données et la valorisation que l’on peut en retirer, que celle-ci soit d’image ou de ventes.

Le mécénat


À qui s’adresse le mécénat dans le secteur culturel ?

Les seuls bénéficiaires (habilités à émettre un reçu de don aux œuvres, pièce indispensable pour obtenir sa réduction d’impôt auprès des services fiscaux), sont les suivants :

  • Organismes d’intérêt général (2) ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
  • Fondations d’entreprises ;
  • Associations ou fondations reconnues d’utilité publique ;
  • Etablissements d’enseignement artistique publics ou privés à but non lucratif agréés par le ministre chargé du Budget et le ministre chargé de la Culture ;
  • Etablissements d’enseignement supérieur publics, ou privés à but non lucratif agréés par le ministre chargé du Budget et le ministre chargé de l’Education nationale ;
  • Organismes agréés qui ont pour objet exclusif de participer, par le versement d’aides financières, à la création d’entreprise ;
  • musées de France ;
  • Associations cultuelles ou de bienfaisance autorisées à recevoir des dons et legs ;
  • Etablissements publics des cultes reconnus d’Alsace et Moselle ;
  • Organismes publics ou privés dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale l’organisation de festivals ayant pour objet la présentation au public d’œuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques et de cirque, à la condition que les versements soient affectés à cette activité.

Depuis le 1er janvier 2010, la réduction d’impôt est étendue à l’échelle européenne et s’applique également pour les dons dont le bénéficiaire est situé dans l’Espace économique européen (Union européenne, Islande et Norvège), selon l’art. 35 de la loi de finances rectificative pour 2009.

Pour vous assurer que vous êtes bien en mesure d’émettre des reçus de dons aux oeuvres, il faut effectuer une demande de rescrit fiscal auprès de l’administration fiscale (BOI 13 L-5-04 du 19 octobre 2004).
À défaut de réponse de l’administration fiscale dans les six mois, l’accord est tacite, mais entraîne cependant un contrôle de la bonne affectation des fonds par la Cour des comptes.

Quel type de mécénat ?


On conçoit le mécénat comme essentiellement numéraire ; cependant, celui-ci peut prendre différentes formes : mécénat en nature, mécénat technologique, mécénat de compétences (un collaborateur de l’entreprise mécène apporte une partie de son savoir et de son temps au bénéficiaire), partenariat média.

Les entreprises peuvent désormais admettre en déduction les sommes correspondant au prix d’acquisition d’instruments de musique. Pour bénéficier de la déduction, l’entreprise doit s’engager à prêter ces instruments à titre gratuit aux interprètes qui en font la demande.

On parle encore de mécénat sans contrepartie directe (mais de contrepartie d’image), lorsque le nom du mécène figure sur les opérations réalisées par l’organisme ayant bénéficié du don quels que soient le support et la forme, à l’exception de tout message publicitaire.

En d’autres termes, pas de page de publicité du mécène dans vos publications, au risque de voir celui-ci considéré comme sponsor et perdre tous les avantages fiscaux évoqués ci-dessous.

Néanmoins, l’administration fiscale admet le concept de contreparties à condition d’une disproportion marquée (inférieure à 25 %) entre les sommes données et la valorisation. Le bénéficiaire du don ne peut être qu’une personne morale, d’intérêt général (son activité ne bénéficie pas qu’à un cercle restreint de personnes) et à gestion désintéressée. Enfin, il ne doit pas exercer des activités commerciales, c’est-à-dire qu’il ne doit pas être soumis à la TVA et à l’impôt sur les sociétés, sauf si son activité principale est la diffusion de spectacle vivant ou de cinéma.

Le parrainage


À qui s’adresse le parrainage dans le secteur culturel ?

Le parrainage concerne toutes les entreprises qui, publiquement, associeront leur nom à un événement culturel ou autre. Elles doivent se placer sous ce régime, même si leur démarche ou leur intention n’est pas publicitaire.

Selon l’article 39-1 7° du CGI (code général des impôts), ces manifestations sont de caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, lorsqu’elles sont exposées dans l’intérêt direct de l’exploitation.

C’est alors un échange commercial (financement ou apport en nature contre publicité) qui donne lieu à une facturation assujettie à TVA. Ces dépenses sont déductibles du résultat de l’entreprise, au titre de charges d’exploitation et assimilées à des dépenses de nature publicitaire, mais qui doivent demeurer dans un rapport normal avec le chiffre d’affaires de l’entreprise et l’avantage escompté. Et comme le précise l’Admical : sans limitation de montant et quel que soit le résultat de l’exercice (sauf à tomber sous la qualification “d’acte anormal de gestion”). Pour être déductibles, les dépenses de parrainage doivent être engagées à l’occasion d’une manifestation, dans l’intérêt direct de l’exploitation aux conditions générales de déductibilité des charges. Celles-ci sont toutefois autonomes par rapport aux dépenses de publicité.

Mécénat ou parrainage? L’argumentaire financier et fiscal


Dans votre recherche de partenaires privés, en dehors de l’argument d’image “positive” dont pourra bénéficier l’entreprise marraine, un argumentaire financier peut être très motivant pour le mécène potentiel. Surtout lorsque les grosses entreprises mécènes, très largement sollicitées, ne peuvent répondre à toutes les demandes.

Par contre, les PME qui dégagent de 20 à 40 millions d’euros de chiffre d’affaires sont de vrais partenaires potentiels.

Ces sociétés pratiquent pourtant très peu le mécénat par manque de connaissances des acteurs culturels et des implications.
Pour pallier à ce manque de connaissances, voici les principales lignes (extraits de l’article 238 bis du CGI, code général des impôts, modifié par la loi du 1eraoût 2003) [3] du plan gouvernemental en faveur du mécénat du 17 décembre 2002 [4] , où l’action du gouvernement tend à renforcer les incitations fiscales des futurs donateurs (particuliers comme entreprises).

Les dépenses de mécénat des entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu et déductibles de leur résultat sont désormais plafonnées à 0,5 % de leur chiffre d’affaires hors taxes et ouvrent droit à une réduction d’impôt de 60 % du montant du versement en numéraire ou en nature. Elles bénéficient de ces réductions d’impôt, notamment dans le cadre des dons versés à des organismes publics ou privés dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation au public d’oeuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques et de cirque ou l’organisation d’expositions d’art contemporain, à la condition que les versement soient affectés à ladite activité. Elles peuvent donc soutenir des organisateurs de spectacles…

Pour les particuliers, l’article 200 du CGI énonce : “ouvrent droit à une réduction d’impôt sur le revenu égale à 60 % de leur montant les sommes prises dans la limite de 20 % du revenu imposable qui correspondent à des dons et versements, y compris l’abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables domiciliés en France” (Loi n°2007-1824 du 25 décembre 2007, JO du 28 décembre 2007 – Légifrance)

Sachez que depuis le 1er janvier 2008 et le vote de la loi de finances rectificative (Loi n°2007-1824 du 25 décembre 2007, JO du 28 décembre 2007), il a été décidé que les particuliers peuvent également soutenir des organisateurs de spectacles et bénéficier des mêmes réductions d’impôt.

Hormis si vous êtes redevable de l’ISF, car depuis le 20 juin 2007 et la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achatLe redevable peut imputer sur l’impôt de solidarité sur la fortune, dans la limite de 50 000 euros, 75 % du montant des dons en numéraire et dons en pleine propriété de titres de sociétés admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger effectués au profit :

– Des établissements de recherche ou d’enseignement supérieur ou d’enseignement artistique publics ou privés, d’intérêt général, à but non lucratif ;
– Des fondations reconnues d’utilité publique répondant aux conditions fixées au a) du 1 de l’article 200 ;
– Des entreprises d’insertion et des entreprises de travail temporaire d’insertion mentionnées aux articles L.322-4-16-1 et L.322-4-16-2 du code du travail ;
– Des associations intermédiaires mentionnées à l’article L.322-4-16-3 du même code ;
– Des ateliers et chantiers d’insertion mentionnés à l’article L.322-4-16-8 du même code ;
– Des entreprises adaptées mentionnées à l’article L.323-31 du même code ;
– De l’Agence nationale de la recherche.

En outre, entreprises et particuliers souhaitant effectuer un don supérieur à ce plafond de 0,5 % du chiffre d’affaires hors taxes ou de 20 % du revenu imposable, peuvent bénéficier de la possibilité de report de l’excédent du don sur les cinq exercices suivant le versement sans dépasser la limite de déduction de 60 % du versement, ni dépasser la limite globale de 0,5 %. Il est à noter que la réduction d’impôt porte directement sur le montant de l’impôt, et non sur le revenu imposable.

L’arrêté du 26 juin 2008 relatif à la justification des dons effectués au profit de certains organismes d’intérêt général mentionné aux articles 200 et 885-0 V bis A du CGI est venu préciser le fait que l’organisme bénéficiaire du don délivre un reçu fiscal (imprimé Cerfa n° 11 580*03) au bienheureux donateur pour les dons ouvrant droit à une réduction d’impôt sur le revenu, d’impôt sur les sociétés ou à une réduction d’ISF.

La convention de mécénat ou de parrainage


Une convention n’est pas obligatoire, mais il est préférable d’en établir une par écrit pour fixer les obligations des parties et limiter les zones de flous, très risquées en termes d’interprétations fiscales. Il n’existe pourtant pas de convention type.

Cependant, toute convention doit faire apparaître les cocontractants, l’objet, la définition du projet, les obligations de chacune des parties (dont le montant du don et ses échéances de versement), les éventuels bénéficiaires des droits d’auteur, l’exclusivité ou le copartenariat suivant le cas, la durée de la convention, l’assurance, la résiliation en cas de non-respect des engagements, la résolution des litiges, etc.

Conservez, dans l’éventualité d’un contrôle fiscal, l’ensemble des documents (justificatifs, pièces comptables, etc.) qui concernent ce mécénat d’entreprise.

Dans L’Officiel de la musique sont répertoriés un certain nombre d’entreprises, clubs d’entreprises et fondations, partenaires potentiels de projets culturels. Cependant, cette liste n’est pas exhaustive et il vous appartiendra de démarcher des entreprises locales susceptibles de correspondre à votre projet culturel. Les radios, magazines culturels, sociétés de location de matériel de scène, les magasins de disques et d’instruments de musique, les sociétés de transport, sont autant d’idées que vous pouvez exploiter dans le cadre du montage de votre projet culturel.

Comment diriger sa recherche de mécènes et/ou de parrains ?


Des répertoires d’entreprises pratiquant le mécénat existent, mais comme dit précédemment, ces dernières sont largement sollicitées. D’autres entreprises peuvent être intéressées si votre projet correspond à leur besoin de communication ou de cohésion sociale interne, qu’il vous appartiendra de déceler.

En outre, l’argument le plus intéressant pour une entreprise est ce système d’étalement sur cinq ans de l’avantage fiscal, sans être privé de réduction d’impôt.

La rédaction d’un dossier clair doit reprendre succinctement l’originalité du projet, la cible (public), le rayonnement géographique, le budget et la nature des contreparties offertes à l’entreprise (logo de l’entreprise sur les outils de communication du projet culturel, mise à disposition d’un quota d’entrées gratuites pour le personnel, soirée privée, etc.).

Signée le 20 avril 2010 et prévue pour une durée de cinq ans, une seconde charte pour le développement du mécénat culturel prévoit, entre autres, de relayer et promouvoir au plan régional et départemental le protocole national, notamment dans la diffusion auprès des chefs d’entreprises des dispositifs incitatifs de la loi du 1er août 2003 et des avantages du mécénat culturel, de promouvoir le mécénat collectif, d’organiser des rencontres et des évènements de nature à favoriser la promotion du mécénat culturel, sensibiliser au mécénat les réseaux d’écoles des CCI, favoriser les échanges d’expériences… Ces développements se feront en s’appuyant sur un certain nombre de relais déjà mis en place (en lien avec les chambres de commerce et d’industrie).

Vous pouvez telecharger cette fiche pratique sur le site de l’Irma.


Bibliographie :


Liens utiles :

Illustration photo: “We want more”

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About Virginie Berger

Virginie Berger est la fondatrice de DBTH (www.dbth.fr), agence spécialisée en stratégie et business développement notamment international pour les industries créatives (musique, TV, ciné, gastronomie), et les startups creative-tech. Elle est aussi l'auteur du livre sur "Musique et stratégies numériques" publié à l'Irma. Sur twitter: @virberg

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