“On peut pas laisser nos créations uniquement aux mains des gens qui la consomment” Exsonvaldes

J’ai rencontré le groupe Exsonvaldes il y a un an et demi, lors d’un concert en appartement, organisé par Thien et Laurent.

Alors c’est quoi un concert en appartement? C’est un concert en accoustique (ou pas) qu’un artiste, qu’un groupe donne chez un particulier. C’est assez étonnant. Pour le public, qui entend et voit un artiste à moins d’un mètre de lui. Et pour l’artiste, qui a le public complètement devant lui. Pas moyen d’échapper au haussement de sourcils et au baillement…Donc faut avoir le courage d’y aller.

J’avais déjà publié cette interview il y a donc plus d’un an et demi, mais sur mon ancien blog, mon bon vieux Tumblr des familles. Mais les propos d’Exsonvaldes restent toujours autant d’actualité. Piratage, Zelnick, revenus….ils se posent aussi des questions sur plein de sujets, sans avoir forcément de réponses. Mais ils tentent. Bandcamp, gratuité, pay what you want après les concerts de live, ils réfléchissent à developper leur visibilité et leurs revenus de manière adaptée à ce qu’ils veulent faire…Et ça m’a semblé vraiment interessant de la re-publier.

Ils avaient démarré cette série de concert en appartement pensant faire seulement quelques dates, ils en ont fait plus de 100. Ils avaient en effet un peu balancé ça comme une boutade à la fin d’un concert en salles “Hey on se déplace dans telle ville, quelqu’un pour nous accueillir la veille?”. Et au final, ça a été pris au sérieux. Vraiment..Leur dernier album « There’s no place like homes » a été enregistré dans les conditions d’un concert en appartement.


L’aventure Exsonvaldes a commencé il y 10 ans, sur les bancs de la fac.



Premier album en 2004 et tournée de plus d’une centaine de dates et des premières parties de Girls in Hawaîi.

Il y a 3 ans, ils décident de se consacrer complètement et uniquement à la musique. Suit alors la rencontre avec Alex Firla, leur producteur et l’enregistrement de leur album « Near the edge of something beautiful », sorti en mars 2009.

L’avenir de la musique ?


Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que s’il n’y a plus d’industrie musicale, il n’y a plus de musique.

On ne peut pas laisser nos créations uniquement aux mains des gens qui la consomment.

Parce que comment continuer à créer dans ce cas ? Mais ce qu’il se passe actuellement  est une vraie chance pour la musique.On peut essayer des tas de choses, tester de nouveaux business models, inventer le futur et non plus se le laisser dicter.

Et on aimerait ressentir cette excitation chez les professionnels de la musique.

On est en train de construire une nouvelle économie de la musique. Les revenus ne vont plus provenir des CD ou des tournées, mais de toute une nouvelle monétisation à construire. Et c’est triste de voir les propositions que font les professionnels de la musique (Hadopi, Zelnick, etc..). On s’enferme toujours dans les mêmes reflexes très corporatistes, sans aucune vision à moyen ou long terme.

Hadopi ? Zelnick ?


Nous sommes contre Hadopi. Ça ne réglera rien, et ça sera pire.

On ne peut rien régler avec des lois ou des taxes.

Mais nous sommes contre le piratage aussi. Aujourd’hui, on n’a pas le choix. Si on est contre Hadopi, on est alors de méchants pirates. En résumé, on est soit Pascal Nègre, soit Francis Lalanne.

Mais l’alternative est possible. On peut être contre le piratage et contre Hadopi.

Et  nous sommes donc contre Hadopi. Et contre le piratage.

Le discours ambiant des contre-Hadopi «  le peuple a repris le contrôle de la culture » ne tient pas la route. Dans la musique, il y a ceux qui la font (nous), ceux qui aident (nos fans, notre label, notre tourneur…) et ceux qui écoutent (le public). Tous les acteurs sont importants pour transmettre la musique.

Après, il faut définir ce qu’on entend par piratage. Quelqu’un qui télécharge notre disque sur un blog, pour découvrir notre groupe, n’est pas un pirate. C’est un curieux. On fait la même chose. S’il aime, on espère qu’il aura envie d’acheter le disque, ou nos disques précédents, ou de nous soutenir en venant à un concert, en parlant de nous autour de lui.

Mais il doit avoir à l’esprit que ce qu’il a téléchargé a nécessité des coûts de production importants, et que c’est grâce à son soutien qu’on pourra faire le disque suivant. C’est cette relation de confiance, précieuse, que nous essayons d’instaurer avec notre public.

Mais s’il pirate aussi notre disque suivant, puis un troisième, on peut considérer que ça commence à ressembler à du vol car c’est nier l’investissement humain et financier que représente un disque.

En somme, je pense que le piratage, ce n’est pas le fait de télécharger de la musique de façon illégale, mais plutôt de considérer que toute la musique est gratuite de fait.

Donc si “le peuple reprend le contrôle de la culture” en volant, alors il n’y aura bientôt plus de culture. Comment nous en tout cas, on pourra continuer à créer ?

Mais en tant que groupe il est facile d’être tiraillé par un sujet comme celui là, car dans le fond, même si c’est en étant piraté, nous sommes toujours contents que notre musique soit écoutée.

Il faut donc responsabiliser les internautes, leur montrer ce que ça coûte de produire, leur montrer les conséquences sur les jeunes artistes. Parce que les discours de Zazie et Pascal Obispo, c’est plutôt contre-productifs…Et si on responsabilise les internautes, pourquoi pas réfléchir à une taxe sur les FAI. Ça serait quand même le plus simple….

Il ne faut rien s’interdire, penser nouvelle économie de la musique, sortir de l’économie du CD  et tester tester…. C’est ce qu’on attend des professionnels. Mais il faudrait le faire très vite. Parce que plus on attend, plus on donne l’impression que la culture est gratuite.

La gratuité de la musique sur Internet ?


L’artiste DIY (Do It Yourself) est une légende (NDRL : Aux Etats-Unis en 2009, 1500 artistes ont vendu plus de 10 000 albums. 14, soit moins de 1%, l’ont fait en étant seul. Sans label). C’est un argument de bonne conscience pour les pirates. On a besoin d’être aidé, quelle que soit la forme que prendront les maisons de disques.

Nous donnons une partie de notre musique sur BandCamp. Pour teaser, nous faire connaître, créer le buzz, donner envie de notre musique. Mais nous ne donnons pas toute notre musique. Et nous ne le ferons pas. On offre des morceaux, car cela nous semble primordial pour notre public. Mais il n’est pas primordial de donner notre album…

Si doit comparer nos revenus issus de la distribution digitale vs nos revenus issus de la distribution physique, pour l’instant la distribution physique gagne très très largement.

Nous testons également d’autres formes de revenus. Après chaque concert en appartement, on propose notre merch, nos CD. On a testé la vente à la Radiohead « Pay what you want », et ça marche plutôt très bien. Les gens donnent 15% à 20% de plus que par rapport aux prix que nous avions fixés.

On ne s’interdit rien. On essaie vraiment d’évoluer à la même vitesse que le marché.

Un artiste à suivre ?


Jonah Matranga (http://www.jonahmatranga.com/). Il a été une véritable inspiration.

C’est en voyant ce qu’il faisait que nous avons commencé les concerts en appartement couplés à la vente de merch. Cela fait plus de 10 ans qu’il fait du Direct  to fans. Être proche de ses fans, ça fait longtemps qu’il le pratique.

Une conclusion ?


Alors j’aurais envie de dire http://exsonvaldes.bandcamp.com. Et notre dernier album « There’s no place like homes ».

Leur site: http://www.exsonvaldes.net

Leur Bandcamp: http://exsonvaldes.bandcamp.com/


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About Virginie Berger

Virginie Berger est la fondatrice de DBTH (www.dbth.fr), agence spécialisée en stratégie et business développement notamment international pour les industries créatives (musique, TV, ciné, gastronomie), et les startups creative-tech. Elle est aussi l'auteur du livre sur "Musique et stratégies numériques" publié à l'Irma. Sur twitter: @virberg

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